L’actuel voyage de Marine Le Pen à Mayotte est doublement interrogateur.
Premièrement, après tout.e.s celles et ceux qui l’ont précédée, il confirme cette capacité qu’a le personnel politique « officiel » à soulever un problème en faisant très attention de ne surtout pas le traiter avec le recul nécessaire. Car il faut une sacrée dose d’abstraction géographique pour oublier que Mayotte appartient à l’archipel des Comores ; par conséquent voir dans les comoriens des « émigrés clandestins », c’est quand même nier totalement la situation coloniale de cette « région administrative » française qu’est Mayotte. Qui pour rappeler que les Comoriens sont quand même plus « chez eux » à Mayotte que les nationaux français !
Cette dose d’abstraction est alimentée par une xénophobie contagieuse. Quand le FN était raciste, le RN se contente d’être xénophobe, pourquoi ? Parce que c’est beaucoup plus rassembleur.
Vis à vis des Comoriens, les Mahorais ne sont pas racistes, il leur suffit d’être xénophobes.
Dans un monde – celui de la croissance – où l’individualisme est poussé à sa limite, c’est la dissociété qui domine, c’est-à-dire cette forme de société qui prétend n’être plus constituée que par les entre-soi et dont le seul dénominateur commun est le rejet des altérités, au nom des identités.
Mieux que toutes les autres formations politiques, le RN l’a compris et peut procéder à une extension de son domaine de nuisance. Il devient ainsi le rassemblement de tous les rejets.
- des « assistés »
- des « étrangers »
- des LGBTQIA+…
- du « wokisme »
- de l’écologie
- bref, de tous les domaines où un être humain universel peut se mettre à la place de tout autre, que cet autre soit dans la misère, d’un autre genre, qu’il soit une autre entité du vivant, qu’il soit un « lointain » ou un prochain…
Voilà pourquoi nous voulons décroître : parce que nous voulons mettre fin à ce monde où la croissance des rejets nourrit toutes les formes de concurrence de chacun.e contre chacun.e.
Un pote-caste du poète de Morvandie sur ce sujet précisément
https://open.spotify.com/episode/1hWKr7rFldnYlE7twE9ZXH
« Vis à vis des comoriens (sic), les mahorais (resic) ne sont pas racistes, il leur suffit d’être xénophobes. »
Traiter en bloc les Mahorais de racistes, tous les Mahorais, qu’est-ce donc, sinon en agrégeant derrière une caractéristique unique – être Mahorais – l’ensemble d’une population que dès lors on s’autorise à stigmatiser: les Juifs, les Gnakwé, les Bicots, les pédés, etc ?
Tel est le racisme ordinaire, systémique d’une certaine gauche qui n’a pas encore compris qu’elle était désormais très, très à droite.
Et puisque les Mahorais sont en blocs d’infâmes racistes leur parole ne compte pas. Leur vote massif d’adhésion à la communauté française compte pour du beurre, car ils ne sont pas vraiment capables d’un choix autonome, pas vraiment humains. François Herrant développe des argumentaires tout à fait parallèle à la prose nauséabonde qu’on lit ici. C’est d’ailleurs celle de Vladimir Poutine: les Ukrainiens n’étant que d’infâmes nazis, ils ne sauraient constituer une nation ni être capables d’autodétermination.
Misère morale et intellectuelle de la « gauche » qui par ailleurs sur ce même site défend le wokisme qui agrège de force toutes les personnes à la sexualité alternative au sein d’une prétendue communauté LGBT, violant ainsi la conscience de ceux et celles aux choix sensuels différents ne se reconnaissant nullement dans le totalitarisme woke (il n’aura pas échappé au lecteur qu’il existe des gays de gauche, de droite, d’extrême-gauche, d’extrême-droite). Et comment ne pas voir que le wokisme est le fer de lance du libertarisme qui nie qu’existe la société, dans le droit fil d’Ayn Rand, de la Dame de Fer, de Mises, d’E. Musk. Misère morale d’un progressisme désormais réactionnaire. Catastrophe politique de l’idée décroissante qui dans le droit fil de l’écologie politique et ses ZFE sait se rendre détestable et nauséabonde et à l’horizon de laquelle point le spectre brun.
Cher Alex, chère Camille,
Malgré la virulence de votre « post », il se peut néanmoins qu’une grande partie de votre attaque manque sa cible et que nous nous retrouvions plus à partager qu’à nous disputer.
Car il y a dans votre courrier un excès de reproche qui ne peut vraiment pas nous être attribué : vous ne trouverez ainsi sur notre site aucune concession ni au libertarisme, ni aux pseudo-pacifistes (en réalité pro-Poutine par anti-américanisme primaire).
Restent néanmoins 2 points de désaccord :
Surtout, vous auriez pu être un peu plus bienveillant en évoquant les deux idées principales de cette « lettre » : 1/ le rappel clair de la distinction entre racisme et xénophobie ; 2/ ce « rassemblement » hétéroclite qui se fait aujourd’hui autour des « rejets » ; on voit bien que le wokisme vous donne de l’urticaire ← mais quand il aura atteint les niveaux d’oppression du patriarcat et du viriarcat, il sera peut-être temps de demander davantage de modération au wokisme : en attendant, son discours radical au nom d’un idéal d’émancipation, le place dans le « bon camp ».
Amitiés 🐌