Le MOC remercie le NPA de lui donner l’occasion de s’adresser à ses militants réunis aujourd’hui dans cette Conférence nationale si importante pour son avenir.
Le modèle capitaliste ne peut perdurer à cause des crises écologique, sociale et humaine qu »il engendre. Les enjeux de notre époque sont doubles : il s’agit de la décroissance de toutes les productions et de toutes les consommations qui dépassent les seuils de soutenabilité. Et partout où domine la pauvreté, la décroissance signifie une décroissance des inégalités et l’abandon de notre « modèle » de « développement », facteur de dominations, de mal vivre et d’impérialisme culturel.
La décroissance, c’est d’abord la critique des contradictions du capitalisme, le constat que 60% de croissance du PIB en 30 ans ont détruit à la fois la société (précarisation sociale) et l’environnement. La décroissance, c’est un retour à la vision « culturelle » de la lutte des classes : « la bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les moyens de productions » (Karl Marx) ; cela veut dire que la lutte des classes est aussi une lutte de civilisations, contre la domination d »une civilisation du déferlement technologique qui ne peut exister :
- sans détruire constamment pour innover constamment,
- sans proposer des nouveaux produits répondant de moins en moins à la satisfaction de besoins fondamentaux,
- sans gaspiller les ressources non renouvelables pour générer de plus en plus de déchets bien au-delà de la capacité d’absorption de la biosphère,
- sans fabriquer sans cesse de la frustration destructrice des liens sociaux.
Un projet d »émancipation sociale ne peut ignorer ces nouvelles données qui hypothèquent l »avenir de notre espèce et immédiatement notre qualité de vie ! A cette fin nous devons rendre visible un projet de rupture anticapitaliste, porté par un bloc social et politique pour sortir d’une fausse alternative : soit le rassemblement à gauche avec (historiquement) le PC et donc aujourd »hui avec le FdG, soit le repli. Un rassemblement d »avenir à gauche doit se faire sans les communistes dont la seule vocation est peu ou prou de toujours tirer, à plus ou moins long terme, vers une alliance « unitaire » avec la sociale-démocratie. Nous devons oser une nouvelle convergence, une convergence d’avenir…
Un tel projet ne pourra être véritablement un projet d’émancipation qu’à condition d’avoir l’audace de propositions fortes, en posant un clivage explicite entre rupture et accompagnement. C’est pour cela que le Mouvement des objecteurs de croissance (le MOC) fait depuis longtemps des propositions appuyées sur des axes politiques forts :
- Nous revendiquons la gratuité de toute une série de biens et services afin de garantir à tous les conditions d’une vie décente.
- Nous pensons que l’usage de toutes les ressources doit être encadré par un plancher et un plafond ; c’est ainsi que nous défendons l’instauration d’un revenu maximal autorisé, d’une retraite unique pour tous (conformément d’ailleurs au programme du CNR), d’un revenu social garanti (pour rompre avec l’aliénation salariale).
- Nous refusons la confiscation de la démocratie et défendons l’instauration d’une démocratie sociale généralisée (mandat unique, impératif, non renouvelable, bilans d’étapes…).
- Nous proposons un projet de Transition énergétique excluant le nucléaire et toutes les énergies létales.
Le MOC est à la recherche d’une forme d’organisation politique adaptée à notre époque, car pour nous il n’y a dans la prise préalable du pouvoir – que ce soit par les luttes ou par les urnes – qu’une illusion qui finalement continue de participer de la Société du Spectacle. C’est pourquoi, le MOC n’est pas seulement impliqué dans la vie politique « classique », celle des élections, des manifestations, des pétitions mais il étend le domaine des luttes sociales, écologiques et démocratiques en s’engageant dans des expérimentations et dans ce qu’il nomme des « alternatives concrètes ». C’est ainsi que le MOC est à l’origine ou accompagne divers projets « de résistances et d’alternatives » : accès à la terre, habitat choisi, monnaies locales, relocalisation, territoires en transition, etc. Sans illusion, sans attendre, il est nécessaire de présenter le projet pour lequel nous nous battons, de rechercher la rupture dans le système présent et pas seulement de chercher à prendre le pouvoir pour impulser ensuite ce qui n’apparaîtra que comme un accompagnement par des réformes.
Au sein d’un projet de convergence des radicalités, anti-capitalistes, écologistes, anti-productivistes et anti-nucléaires, nous apparaîtrons comme un aiguillon de radicalité, pour imposer les débats et les propositions ici et maintenant : au nom d »un droit souverain aux expérimentations sociales et écologiques, par exemple pour des services territoriaux de l »énergie, en visant un effet de masse critique (la puissance des minorités plutôt que le pouvoir des majorités, les contre-pouvoirs plutôt que la prise préalable des pouvoirs), en allant aux élections non seulement pour des « effets de propagandes » mais aussi pour construire des « rapports de force ».
C’est pour cela que nous vous proposons un tel rassemblement des radicalités à partir de la création d’une plate-forme de convergence écologiste et sociale.
- Qui questionnerait la question des services publics non plus seulement à partir de leur forme (égalité, continuité, adaptabilité, péréquations) mais de leur contenu et de leur gestion, à partir des biens communs, de la gratuité des usages et de la surtaxation des mésusages.
- Qui envisagerait la reconversion industrielle nécessaire pour tous ceux qui aujourd’hui ont un emploi dans des secteurs qui, conformément à nos exigences sociales et écologiques, doivent être abandonnés.
- Qui partirait du constat que tous les êtres humains ont un égal « droit de tirage » sur les ressources de la Terre.
- Qui proposerait la mise en œuvre de régies publiques territoriales des flux : eau, énergie, déchets, transports, etc.
- Qui proposerait l’arrêt immédiat du nucléaire avec des scénarios crédibles de sortie du nucléaire et de la société industrielle.
- Qui porterait les débats et le droit à l’expérimentation sociale au sein des luttes contre la misère, la délocalisation, la gestion municipale catastrophique de la droite comme de la gauche, contre la classe politique qui se moque totalement du bien public, etc.
Nous vous souhaitons une bonne Conférence nationale, et nous vous apportons toutes nos salutations les plus confraternelles.