Une nouvelle de Michèle DESCOSSY
La nouvelle
Suite aux manifestations massives, le gouvernement se voit contraint de reculer sur sa réforme des retraites et le Président dissout l’Assemblée. L’Union Sociale Ecologique obtient alors une large majorité de sièges.
17 octobre 2023 Palais Bourbon. Première séance plénière sur la nouvelle réforme des retraites
– « La parole est à Madame Camille Lebon, présidente du groupe des décroissant.e.s. »
– « Mesdames, Messieurs, Chèr-es collègues. Dans cet hémicycle nous partageons majoritairement des valeurs de gauche. Il y a pourtant un impensé dans nos rangs. Si je vous pose la question « Est-il juste de maintenir lors de la retraite, les inégalités de revenus perpétrées dans le monde du travail ? » Que répondez-vous ? »
Des « non » fusent.
– « Alors pourquoi, pourquoi, chèr-es collègues, lorsque Johanna, femme de ménage, ne travaille plus, continue-t-elle de percevoir moins que Bernard, le « patron » qui ne travaille plus non plus ? Au nom de quelles valeurs, consentons-nous à perpétuer ces inégalités en faveur des plus nantis : au nom de leurs sacrosaints diplômes ? de leurs responsabilités passées ? Pourquoi ces distinctions devraient-elles encore prévaloir lors de la retraite, période de non-travail ? »
Un certain brouhaha suit la prise de parole de C. Lebon, connue pour ne pas y aller par quatre chemins
– « Vous l’aurez compris, il s’agit, chèr.e.s collègues, de défendre notre proposition phare : la retraite inconditionnelle d’un montant unique pour toutes et tous. Oui, à 60 ans, une même pension quel que soit le nombre d’annuités ! »
« Ici Mathieu Délier en direct de l’Assemblée Nationale, je vous rends l’antenne, car j’entends comme un séisme dans les rangs de À droite toute ! La réforme proposée par la députée décroissante va sûrement être facile à adopter, car c’est une idée qui fait son chemin parmi la population. »
Ici France 3 Occitanie. Merci Mathieu pour votre reportage un peu chahuté. Nous vous retrouvons donc demain à la même heure pour la suite des événements, car vous restez avec nous pendant tous les débats pour nous informer de l’évolution de cette réforme, en reportage dans votre région. A demain.
Le lendemain, des reportages avaient donc été programmés, et Mathieu allait passer sa journée à visiter toutes les commissions qui s’étaient mises en place pour travailler sur la réforme et qui remplaçaient cette Convention Citoyenne des personnes tirées au sort. Cette fois, les idées, les discussions et les décisions viendront de la base directement des citoyens concernés.
Partout, dans les Mairies, dans les usines et les ateliers, dans les écoles, les lycées, les Universités, sur les marchés et même dans les supermarchés, des sessions de discussions avaient lieu et rassemblaient autour de tables les volontaires désirant co-construire cette réforme des retraites pour le bien de tous.
Mathieu, désigné par France 3 son donneur d’ordre, était bien heureux de parcourir sa ville en quête de ce bouleversement programmé, pour en rendre compte à la Nation.
Il commença par la Mairie de sa ville, jolie petite ville de province, avec ses places, ses platanes, ses petits commerces, ses rues piétonnes, et sa librairie en SCOP dont il était le plus fervent sociétaire.
Dans la salle municipale du Conseil, avaient été réparties quelques tables autour desquelles discutaient déjà les personnes les plus motivées. Il faut dire que le temps était compté : deux semaines seulement avaient été accordées pour cette initiative. Il fallait d’abord se partager les problématiques entre les tables, puis faire la synthèse et ensuite désigner un rapporteur. Tout cela allait prendre du temps. Si on voulait participer à l’élaboration de cette nouvelle réforme, il fallait s’organiser et ne pas se délayer dans des élucubrations sans fin.
Tous pouvaient venir parler, donner son avis. Au début, ce fut un peu le bazar, ce chantier improvisé. Mais bien vite chacun comprit que si on voulait progresser sur ce problème des retraites, il fallait se discipliner.
Le résultat de cette initiative collective serait important pour la suite.
Chaque table se mit au travail. Il fallait décider de quelle somme serait cette pension de retraite délivrée à tous, Table N°1. Puis comment obtenir cette somme, qui cotiserait, combien, Table N°2. A partir de quel âge pourrait-on prendre sa retraite, âge flexible selon le métier, le même âge pour tous, Table N°3. Enfin, une table supplémentaire avait été demandée avec tellement d’insistance et parce que quelqu’un avait répliqué qu’il fallait commencer par éradiquer la pauvreté, qu’on l’installa, bien qu’elle n’ait pas de rapport, croyait-on, avec la retraite : elle s’occuperait de réfléchir sur le fameux Revenu de base Inconditionnel.
Et il y avait dans un coin un peu retiré, tout au fond de la grande salle municipale, une Table N°5 pour tous ceux qui n’avaient pas trouvé leur bonheur au sein des quatre premières tables, et qui regroupait les indécis, ceux qui discuteraient du temps qu’il fait, du temps qui passe. Finalement, pensa Mathieu, ce sera peut-être la table la plus créative.
Une place vacante à la Table N° 1 invita Mathieu à s’asseoir. Il mit en route son magnétophone non sans avoir demandé la permission aux intéressés.
Soudain, une femme se leva. « J’ai trouvé ! », annonça t’elle bruyamment. Mathieu approcha son micro. « C’est simple ! Puisqu’ils disent que la moyenne nationale des retraites est actuellement de 2000 euros environ, la retraite pour tout le monde pourrait donc être égale à 2000 euros ».
« C’est pas mal, 2000 euros », rétorqua son voisin.
« On pourrait même baisser à 1700, par exemple, et on mettrait 300 Euros de côté pour une caisse de solidarité et de prévoyance », ajouta Mireille, la femme de ménage de la municipalité.
Tout autour de la table, chacun.e avait son mot à dire concernant cette somme, qui pour certains était importante.
L’employé de la banque voisine, qui s’était mis en congés pour la journée, prit une feuille, dessina un tableau à plusieurs entrées et commença à aligner des chiffres, à faire des calculs.
Mathieu, que les chiffres rebutaient depuis sa classe de philo, se décida à quitter la table N°1 et rejoignit la table N°2 : comment obtenir cette somme ?
« Faire payer les robots ! ils remplacent des personnes ces robots ! Y a plus de caissières c’est des caisses automatiques ! Non seulement, c’est des robots, mais en plus c’est toi qui travailles ! tu pèses, tu scannes, et tu paies ! »
« Et les machines dans les bureaux de poste ! C’est toujours la galère, y a personne aux guichets ! Déjà qu’ils étaient pas nombreux ! »
« Bon ! dit l’animateur, le « modérateur », celui qui remet la discussion dans le bon sens, celui que tout le monde à la table a accepté dans ce rôle.
« Résumons : faire payer les robots, OK, c’est une bonne idée, c’est faire payer les patrons, vous êtes d’accord ? Mais peut-être que ça ne suffit pas. Faut trouver d’autres sources de financement.»
C’est alors que Monsieur le Maire, présent à la table, se leva, se racla la gorge, ôta son écharpe, se mit à parler doucement pour que tout le monde se taise et l’écoute.
« Il faut taxer les dividendes, les profits, les hyperprofits bien-sûr. Je suis tout à fait d’accord avec ça, mais ce ne serait qu’un début. Car, à terme, il ne faut plus de dividendes, il n’y en aura plus d’ailleurs ! le profit, la plus-value, le gain du travail ira à chacun des travailleurs, égalitairement. Il faut penser plus loin » ajouta t’il en pesant bien ses mots.
Et tout le monde d’applaudir Monsieur le Maire qui se rassit en s’essuyant le front, épuisé par cette déclaration. On ne connaissait pas Monsieur le Maire aussi révolutionnaire !
Mathieu, reporter modèle et motivé n’avait rien perdu de cette déclaration, l’avait filmée et pensait bien la proposer pour le 19/20 National de France 3.
Un voisin ajouta : « il n’y a pas que les superprofits, il y a aussi les milliards d’Euros qui s’évaporent dans l’optimisation fiscale ! »
« Il faudra bien que les travailleurs continuent de cotiser, au moins pour un temps encore », dit Madame Lebris, la représentante syndicale du supermarché. « Parlons donc de cette cotisation. Déjà, il faut garder la retraite par répartition.»
Mathieu laissa là cette réflexion qui suscitait des opinions différentes.
Il se dirigea vers la table N°3 qui avait l’air de s’être un peu enflammée. Basile, le boulanger-pâtissier du coin avait entamé la discussion. Le sujet de cette table concernait l’âge auquel chacun peut prétendre à la retraite, et Basile, qui venait de recevoir son analyse de sang montrant un indice glycémique galopant, prétendait que son hyperglycémie, c’était une maladie professionnelle non reconnue, et qu’il avait droit à une retraite anticipée.
La discussion s’était envolée sur le sujet des métiers pénibles, et chacun avait son avis sur la question. « Il faut qu’aucun métier ne soit pénible ! dit M. Doucet, cadre dans l’entrepôt de transport et logistique, qui distribue des colis partout dans la région.
« Chez nous tous les employés commencent à cinq heures du matin et remplissent les camions. Ils portent des kilos et des kilos chaque jour pendant des heures, c’est un travail extrêmement pénible. Ca me désole de les voir trimer comme ça ! »
« Moi, mon père, il est maçon », continua une jeune fille, « il est déjà épuisé, il n’a que 50 ans, et jusqu’à quand va-t-on vouloir le faire travailler ? »
« Finalement, 50 ans c’est un bon créneau pour finir sa vie de travail quand on a fait un métier pénible, et commencer une nouvelle vie pleine d’activités diverses. Il reste du temps à donner aux autres, sans être trop abimé ! », répondit M. Doucet. Il ajouta : j’ai lu dans un journal sérieux que les éboueurs ont 17 ans d’espérance de vie en moins comparé à un cadre ! Vous vous rendez compte ! »
Basile reprit la parole : « Il faudrait échelonner et dire qu’à partir de 50 ans, après un métier pénible, on peut prendre sa retraite et dans d’autres métiers à 55 ans, on pourrait choisir soit de continuer, soit un travail à mi-temps, et pour un cadre, ce serait 60 ans l’âge de la retraite. Qu’en pensez-vous ? »
« Et plus question d’annuités ! et de méritocratie ! » répliqua sa voisine. « D’ailleurs, les métiers les plus pénibles devraient être ceux qui sont les mieux payés, ajouta-t-elle.
« Bon. Attention à ne pas s’éparpiller, notre problème à cette table, c’est l’âge de la retraite », répliqua Madame Aubert, infirmière à l’hôpital de la ville voisine, tout juste retraitée.
Voyant l’heure filer à toute allure, Mathieu décida d’abandonner cette Table N° 3, et se dirigea vers la table qui travaillait sur le Revenu Inconditionnel. Il était curieux de savoir où ils en étaient après presque une journée complète de débats. Étonnamment cette Table N° 4 ne regroupait que des jeunes. Il évalua au pif : entre 18 et 30 ans, pas plus. Des lycéens, des étudiants et des jeunes travailleurs. Le Revenu Inconditionnel semblait ne pas intéresser les travailleurs plus âgés et les retraités. Ce qui est un peu normal finalement, pensa Mathieu.
Plusieurs d’entre eux avaient pris des notes, ils avaient l’air de se reposer sur leurs lauriers !
Il s’assit à côté de Kevin, son jeune voisin d’immeuble qu’il connaissait pour l’avoir rencontré parfois lors de manifestations étudiantes.
Mathieu leur demanda de lui faire un résumé de leurs réflexions. Il brancha son magnétophone. Kevin prit la parole, lisant ses notes.
« Nous avons tous été d’accord sur le principe d’un revenu inconditionnel pour tous. Pas d’opposant.
Nous avons discuté du montant et avons opté pour 1400 Euros à partir de 18 ans. Cette somme permet de vivre dignement : trouver un logement, se nourrir. Au sujet des dépenses, on a pensé que la santé, la culture et l’éducation devaient être entièrement gratuites. Nous savons par des expériences faites dans d’autres pays, que ce revenu inconditionnel n’empêche nullement de travailler, parce que le travail est une reconnaissance sociale. On peut se réaliser dans son travail, à condition bien-sûr que celui-ci soit un travail qui nous plaît et qui a du sens pour la collectivité. Et arrivé à l’âge de la retraite, c’est le montant de celle-ci qui remplacera le revenu inconditionnel.
On s’est dit aussi qu’il faudrait le partager, le travail, afin de diminuer le chômage, en travaillant tous un peu moins. Moins de stress, moins de burn-out, moins de maladies professionnelles, égale : moins de dépense de santé ! Tout le monde y gagne !
D’abord, il faut tout redistribuer, égalitairement, le travail, le temps, l’argent, les impôts. »
Jules, étudiant en économie ajouta : « En plus, le revenu inconditionnel sera directement réinvesti dans l’économie réelle. Plus de pauvres ! Plus de SDF ! Plus de dépenses pour l’insertion sociale ! Bref, que des économies pour l’Etat !»
Élodie, qui avait levé la main prit la parole : « Et comme on travaillerait moins, ça laisserait plus de place à la créativité. Avez-vous remarqué, pendant le confinement dû au Covid, toute cette créativité qui s’était développée ! Et qui nous a bien fait rire parfois ! Nous, on veut une société de rigolades, de gens heureux de vivre, avoir des potes, se promener dans les jardins partagés, bien manger, bien vivre, quoi ! Et partager surtout, ne laisser personne sur le bord du chemin.
« C’est d’une société centrée sur le travail dont il faut nous libérer ! », dit Mathieu, débordant d’enthousiasme, entrevoyant un chouette avenir pour tous les jeunes, et les moins jeunes aussi. Ils en avaient de l’imagination. Si tout ça pouvait advenir, cela ferait une société heureuse, joyeuse et créative. Mathieu en était convaincu.
Sur cette parole annonciatrice d’un avenir positif, il quitta la salle municipale, vidé, fatigué, et rentra chez lui en souriant.
Le lendemain matin, en pleine forme, Mathieu envoya à France 3 un compte-rendu de la journée de la veille, et regagna la salle de la Mairie où les débats continuaient de plus belle.
La Table N°5, la table indéfinissable s’était étoffée. C’était encore Basile qui pérorait. Il avait l’air d’avoir siégé à toutes les tables et d’avoir décidé de s’arrêter ici.
À côté de lui, on pouvait reconnaître l’élu de l’opposition municipale, Jean-Didier, À droite toute !, en sueur, tout rouge et la cravate desserrée. Il avait fort affaire avec ses voisins de table.
Basile tapa sur la table et dit solennellement : « C’est d’une société centrée sur le travail dont il faut nous libérer ! Sortons de l’économie productiviste, laissons la place aux seuls métiers qui donnent du sens à nos vies et qui participent au bien de tous ! »
« Il faut distribuer le travail et pouvoir choisir son temps de travail. Je propose aussi des années sabbatiques disséminées tout au long de la vie, afin de réfléchir, de ralentir, de faire des actions écologiques, bénévoles, de créer du lien intergénérationnel, et de se former dans d’autres domaines. »
« Je vote pour la même retraite pour tout le monde : tout le monde participe au bien commun, dit Pierrot le mécanicien. Adeline, ma femme, mère au foyer, tous les jours elle m’a aidé à tenir le coup ! Et elle en a eu du boulot, avec nos trois marmots, c’est moi qui vous le dis ! Elle a bien mérité une retraite elle aussi ! »
Il ajouta « En plus, maintenant que les gamins sont grands, elle est bénévole aux restos du cœur. Tous les soirs, elle rentre les larmes aux yeux. Ils donnent aux pauvres des aliments qui ne sont pas terribles, elle dit que ces aliments sont produits à bas coût spécialement par les grosses entreprises agroalimentaires, et que comme ça, ils ont moins d’impôts à payer ! »
Basile lui répondit « Moi j’ai entendu qu’on pourrait mettre en place une sécurité sociale de l’alimentation, avec une espèce de carte vitale pour tous, qui donnerait droit à une alimentation digne et choisie, locale, bio et écolo. »
Jean-Didier leva la main pour demander la parole : « Si tout ce que vous prônez prend forme et se réalise, moi je vous dis Chapeau ! Mais vous allez m’expliquer comment vous allez faire, comment vous obtiendrez l’argent pour ça ? Quelles sont les banques qui vont vous soutenir ? Où allez-vous trouver les fonds ? »
Il ne raisonne qu’en termes de finances, pensa tout le monde en son for intérieur.
C’est alors que Marianne qui n’avait rien dit depuis le début de la discussion, Marianne que tout le monde connaissait, la vieille libraire, l’ancêtre du lieu qui avait laissé sa librairie à ses clients-lecteurs qui en avaient fait une SCOP, Marianne se leva et clama :
« Enfin ! Soyez réalistes ! Demandez l’impossible ! »
Le commentaire du jury
Vous faites partie des trois lauréat.es de ce deuxième concours d’ »anciennes » de la Maison Commune de la Décroissance : parmi ces lauréats, vous avez reçu le prix « Démocratie ».
Permettez-nous ce commentaire étayé de nombreux extraits de votre nouvelle…
D’un point de vue littéraire, vous nous présentez une vision claire du sujet. Très bien vue l’idée de choisir comme narrateur un reporter de chaîne publique qui va pouvoir nous présenter les divers aspects du débat organisé en circulant de table en table auprès des divers participants que vous ne manquez pas de présenter. Ce sont des gens « ordinaires » (et ce n’est pas péjoratif), il y a le boulanger, la bibliothécaire, le mécanicien… autrement dit des gens de la cité, qui viennent donner leur avis pour construire ensemble cette réflexion collective.
D’un point de vue politique, vous permettez à une situation de démocratie participative d’avoir lieu, c’est-à-dire la mise en place d’un débat organisé et pris en charge par les citoyens eux-mêmes dans une forme de partage de la réflexion sur un thème, pouvant ensuite alimenter la décision politique. Nombreuses vont alors être les propositions de bon sens pour faire face aux problèmes sociaux et environnementaux que l’on ne peut se contenter de qualifier d’actuels, tant ils viennent d’un passé où les alertes n’ont pas manqué et tant ils vont peser sur notre avenir. D’un point de vue décroissant, vous placez au cœur du débat le [« revenu de base inconditionnel »] qui devrait constituer la suite logique de cette réforme pour une retraite d’un montant unique. Et vous faites la part belle à un des crédos de la décroissance, qui s’est énoncé à travers « la phrase intermédiaire à intégrer » « C’est d’une société centrée sur le travail dont il faut nous libérer. » que vous faites apparaître à deux reprises !
D’un point de vue féministe : vous ajoutez une touche féministe en faisant tenir à Pierrot le mécanicien des propos en faveur de la reconnaissance du travail invisible, non reconnu et non rémunéré des femmes au foyer. Là aussi, le revenu de base inconditionnel comblerait ce manque de prise en compte des activités des femmes alors qu’elles sont le socle pour que tout continue à tourner !
D’un point de vue littéraire
Vous situez l’action dans une [jolie petite ville de province, avec ses places, ses platanes, ses petits commerces, ses rues piétonnes, et sa librairie en SCOP], et plus précisément dans [la mairie de la ville] de Mathieu Délier qui doit faire un reportage [pour en rendre compte à la Nation], ce n’est pas rien. Vous décrivez bien l’effervescence qui règne après ce [bouleversement programmé] puisque [la réforme proposée par la députée décroissante va sûrement être facile à adopter, car c’est une idée qui fait son chemin parmi la population. »].
Ce n’est pas rien, en effet, car on imagine la Nation tout entière [au travail !] : [Partout, dans les mairies, dans les usines et les ateliers, dans les écoles, les lycées, les universités, sur les marchés et même dans les supermarchés], il y a [des sessions de discussions] pour [coconstruire cette réforme des retraites pour le bien de tous.] Souvenons-nous, votre fiction a rejoint la réalité en ce qui concerne la discussion sur l’adoption du » traité constitutionnel » en 2005 en France, un NON, non respecté ! Souhaitons une meilleure issue à votre débat…
D’un point de vue politique
Un tour d’horizon de ce que suggèrent vos personnages, lors du débat : attentivement, ils s’écoutent les uns les autres, leurs propositions se construisent les unes par rapport aux autres :
– Les premiers points abordés aux [Tables 1 et 2], proposent respectivement un montant « à la louche » (mais comment faire autrement dans un 6 pages ?) de [2000 €] pour la retraite unique (ramené à [1700 €], plus compatible avec une société soucieuse de faire décroître sa néfaste empreinte sur la planète) et le fait de faire payer aux riches l’addition « Il faut taxer les dividendes, les profits, les hyper-profits bien-sûr… mais ce ne serait qu’un début.]. Avec une visée de répartition luttant contre les inégalités : [car, à terme, il ne faut plus de dividendes… le profit, la plus-value, le gain du travail ira à chacun des travailleurs, égalitairement.]
– La discussion aborde le cas particulier des métiers pénibles, [Table N°3] : M. Doucet, cadre dans l’entrepôt de transport intervient [« Il faut qu’aucun métier ne soit pénible ! »], et pourtant la bibliothécaire n’avait pas encore dit [« Soyez réalistes, demandez l’impossible ! »]. Une jeune fille s’écrie [« Moi, mon père, il est maçon, il est déjà épuisé, il n’a que 50 ans…] [« Finalement, 50 ans c’est un bon créneau pour finir sa vie de travail quand on a fait un métier pénible, et commencer une nouvelle vie pleine d’activités diverses. Il reste du temps à donner aux autres, sans être trop abimé ! »], répond M. Doucet. Il ajoute : [« j’ai lu dans un journal sérieux que les éboueurs ont 17 ans d’espérance de vie en moins comparé à un cadre ! Vous vous rendez compte ! »]. C’est alors que Basile, le boulanger-pâtissier, intervient [« Il faudrait échelonner et dire qu’à partir de 50 ans, après un métier pénible, on peut prendre sa retraite »]et il propose que [dans d’autres métiers à 55 ans, on puisse choisir soit de continuer, soit un travail à mi-temps], donc déjà une retraite à mi-temps bonne pour la planète ! En ce qui concerne [un cadre, ce serait 60 ans l’âge de la retraite… »], on ferait donc des cadres un autre cas particulier, sans doute eu égard au bon niveau de vie, donc de santé dont ils ont bénéficié.
D’un point de vue décroissant
– A la table des jeunes, [Table N°4] : on pense qu’il faut [commencer par éradiquer la pauvreté], on se consacre à [réfléchir au revenu de base inconditionnel] souhaité à l’unanimité autour de la table, revenu qui permettrait s’il était de [1400€, à partir de 18 ans], [de vivre dignement, trouver un logement, se nourrir], tout ce qui concerne [la santé, la culture et l’éducation] devant être gratuit. Ce revenu n’empêcherait pas d’avoir une activité rémunérée à condition qu’elle soit une activité, qui ait [du sens pour la collectivité]. [Partager, ne laisser personne sur le bord de la route] voilà tout ce que permettrait ce revenu inconditionnel, c’est à dire pour tout le monde, [tout le monde participe au bien commun], dit Pierrot le mécanicien.
– Ce que Basile revendique à [la Table N°5] en tapant sur la table et en parlant [solennellement] comme pour annoncer un verdict ! [« C’est d’une société centrée sur le travail dont il faut nous libérer ! Sortons de l’économie productiviste, laissons la place aux seuls métiers qui donnent du sens à nos vies et qui participent au bien de tous ! »], ce qui permettra sans doute, de plus, à la longue, de repasser sous des limites raisonnables pour la planète.
D’un point de vue féministe
C’est encore Pierrot le mécanicien qui, en soulevant le problème de la « non retraite reconnue » des femmes (sauf en réversion si tout va bien), [« Adeline, ma femme, mère au foyer, tous les jours elle m’a aidé à tenir le coup ! Et elle en a eu du boulot, avec nos trois marmots, c’est moi qui vous le dis ! Elle a bien mérité une retraite elle aussi ! »] soulève indirectement ce problème de non reconnaissance des femmes tout au long de leur vie si elles n’ont pas un travail « déclaré », le travail au foyer comptant pour rien, puisqu’il est gratuit !!! Voilà déjà une raison évidente mais il y en a tant d’autres (pensons à tous ceux qui participent au bien commun), de revendiquer la mise en place d’un revenu de base inconditionnel !